Histoire de la Photographie.

Sans prétendre faire ce que d'innombrables ouvrages ont déjà apporté comme connaissances sur l 'histoire de la photographie, il ne nous paraît pas inutile, dans le cadre de ce site, de rappeler cette histoire qui fourmille d'anecdotes.  Histoire et description des techniques et procédés nous feront passer de la merveilleuse invention de Niepce et Daguerre, en 1839, aux procédés les plus modernes actuellement développés.



Photosensibilité.

Au premier siècle avant notre ère, l'architecte romain Vitruve, recommandait à ses contemporains de placer leurs tableaux face au Nord, afin qu'ils ne soient pas frappés par le soleil. On savait déjà que la lumière décolore les étoffes, fait changer l'aspect des végétaux, basane la peau, donc qu'elle a une action sur de nombreuses substances.

En 1565, l'alchimiste Fabricius, observa qu'un minéral assez rare, d'aspect vitreux et de couleur blanche que l'on nomma lune cornée et qui est du chlorure d'argent naturel, se colorait en violet sous l'action de la lumière.

A la fin du XVIII° siècle, de nombreux chimistes, tout particulièrement un anglais, Wedgewood utilisa cette propriété pour obtenir la silhouette, l'ombre de feuilles d'arbres : il les plaçait au-dessus d'un papier imprégné d'une solution de chlorure d'argent et obtenait une image telle que celle çi-dessous

En 1800, un physicien français, Charles, qui enseignait au Conservatoire des Arts et Métiers, reproduisit ainsi quelques gravures, mais une fois le modèle retiré, si on maintenait au jour ce calque grossier, il noircissait uniformément en peu de temps. C'était cependant la première fois qu'une image était ainsi reproduite. Il ne restait plus, si l'on peut dire, qu'à combiner cette première invention avec une autre, déjà ancienne, la chambre noire.

La chambre noire.

Supposons que nous nous enfermions à l'intérieur d'un local situé en bordure d'une place dégagée et que, après avoir fait l'obscurité, nous pratiquions une petite ouverture dans l'un des volets. En disposant un écran blanc, à une certaine distance du volet percé, nous verrons que les rayons de lumière émanant des objets extérieurs sont entrés dans la pièce et se terminent en taches lumineuses jointives dont l'ensemble forme une image renversée de ces objets. Ce renversement est dû au fait que dans l'air, la lumière se propage en ligne droite. C'est cela le principe de la chambre noire, qui engendre des images reproduisant exactement la perspective des objets placés devant son ouverture.Elle est connue depuis fort longtemps : Euclide, géomètre grec qui vivait il y a 2300 ans, mentionne ce dispositif. Au XVI° siècle, le moine anglais savant Roger Bacon la décrit clairement. Plus tard, Léonard de Vinci en recommande l'usage aux dessinateurs. Pour que les images de la chambre noire soient nettes, le trou d'entrée de la lumière doit être minuscule. Cet orifice est dénommé sténopé.

C'est un sculpteur napolitain, Jean Baptisite Porta qui le premier à la fin du XVI° siècle équipa cette chambre d'une lentille transmettant à l'intérieur beaucoup plus de lumière que le trou minuscule du Sténopé.

Il restait à combiner chambre noire et surface photosensible...Mais déjà, avant cette surface photosensible, la Chambre noire eut quelque utilité. 

Evocation de la Chambre obscure en 1768

James Bruce, Voyage aux sources du Nil, en Nubie et en Abyssinie pendant les années 1768 à 1772. Edition française Nouvelle bibliothèque des Voyages, tome soixantième. Chez Lecointe, Libraire quai des Augustins n° 49 . 1830

James Bruce

"En choisissant a Londres mes instruments , j'avais songé à une chose qui, bien que fort petite et dans un état imparfait, m'avait été tout ensemble agréable et utile dans mes premiers voyages. C'était une chambre obscure, dont la première idée m'était venue en lisant le Spectacle de la Nature de Pluche. Je confiai la taille des verres à MM. Nairne ct Blunt, ouvriers fameux pour les instruments de mathématique, et dont, par ma propre expérience et p1usieurs épreuves réunies, j'ai droit de louer les talens et l'exactitude.

Cette nouvelle chambre obscure me revint fort cher, et formait un assez gros volume lorsqu'elle était montée; mais, le bas pouvant être séparé du haut et se replier par le moyen de charnières, elle n'était ni pesante ni embarrassante , et ce qu'il en coûtait pour les ad ditions et les changemens se trouvait plus que compensé par les avantages qui en résultaient. La chambre même formait un hexagone de six pieds de diamètre, dont le sommet était en cône. Là le dessinateur s'asseyait sans être vu, comme dans un cabinet de jardin, et il travaillait à son aise. II y a maintenant une de ces machines faites, je crois, d'après les mêmes principes que la mienne, et ayant les mêmes dimensions, qu'on montre dans les rues de Londres, et qu'on appelle un délinéateur.

Par le moyen de cette machine, une personne d'un médiocre talent ,mais habituée aux: effets de là chambre obscure, peut, en dessinant des ruines d'architecture, faire plus d'ouvrage et d'un meilleur goût en une heure que le plus habile dessinateur n'en pourrait faire en sept heures, sans un pareil secours. Avec un peu d'attention et de patience, non seulement l'élévation de l'objet qu'on dessine et toutes les autres proportions sont rendues avec la plus grande vérité, mais le jour et les ombres, les brêches que le temps ou la main des hommes y a faites, les vignettes, les plantes même qui en font un des ornemens , et qui croissent ordinairement sur lesprojections et sur les bords des ruines, y sont parfaitement exprimées, et de plus on y apprend à les changer de place et à les mcttre dans les endroits où elles peuvent produire encore plus d'effet.

Un plus grand et plus précieux avantage est encore dû à la chambre obscure. Tous les paysages, tous les points de vue qui constituent le fond du tableau, sont réels et d'une vérité frappante, et c'est d'autant plus utile que, dans un pays tel que l'Afrique, la nature offre sans cesse des scènes pittoresques, bien supérieures à tout ce que peut enfanter l'imagination la plus brillante. Les nuages passagers, surtout ceux qui sont les plus épais et qui couvrent un ciel orageux, peuvent être fixés par deux ou trois coups de crayon sans art. Les figures, dans leurs vêtemens et leurs altitudes les plus agréables, s'y présentent de manière qu'une main ordinaire peut les bien saisir très-promptement, et ce qui vaut encore mieux, avec ces esquisses on est à même d'employer ensuite les meilleurs artistes, et alors il est aisé de donner la plus grande perfection à ce qu'oe veut rendre, sans le dénaturer en rien ; c'est même ce que j'ai toujours préféré et accolnpli avec succès.

Il est pourtant vrai que la chambre obscure a un défaut d'optique fondamental, mais il est frappant , et on le reconnaît immanquablemcnt tout de suite, et il faudrait avoir bien peu de capacité et être bien borné dans la théorie et dans la pratique, si l'on ne trouvait pas le moyen d'y remédier sans peine et en très-peu de temps.

Je fus si satisfait des premiers essais que je fis don de ma chambre obscure à Julia Cœsarca, maintenant Shershell , à soixante milles d'Alger, que j'en demandai une plus petite en Italie. Celle-ci fut exécutée avec assez d'ignorance et d'incapacité; mais elle me devint cependant utile, parce qu' elle fut cause que la première, n'étant point perdue dans mon malheureux naufrage à Bengazi , l'ancienne Bérénice , située sur la côte du Cyrénaïque, je fus il même d'accomplir tout ce que je désirais de mon voyage à Palmyre.

Je m'étais donc procuré toutes les choses qui m'étaient nécessaires, ou du moins toutes celles dont j'avais prévu avoir besoin; mais malgré cela il m'en manquait encore heaucoup.

Indépendamment des ruines d'architectureque je voulais faire connaître au public, il y avait plusieurs autres objets non moins dignes de son attention. L'histoire naturelle du pays, les mœurs et le langage des habitans, ainsi que tout ce qui avait rapport à la physique et à l'astronomie, et qui pouvait servir à faire tracer une carte intelligible et utile de cette partie de l'Afrique, étaient sans doute de la plus grande importance.

Le temps qu'il fallait pour plier et replier mes divers instruments , pour les monter et les rectifier, aurait presque suffi pour occuper un seul homme, s'il avait eu besoin de s'en servir souvent, et qu'il n'eût pas été très au fait. C'est pourquoi je voulus me procurer un certain nombre d'aides, c'est-à -dire , trois ou quatre au moins, qui pussent chacun se charger d'une partie différente. Je m'étais engagé, ct mon orgueil se trouvait intéressé à montrer combien il était facile de tromper les prophéties oiseuses des ignorans, qui prétendaient qu'un pareil voyage était un objet de plaisir pour celui qui l'entreprenait, et non d'utilité publique. ...

A suivre...

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