H istoire de la photographie.  Les frères Pathé

Dans notre précedent chapitre, nous avons abordé l’histoire de la formidable réussite de Kodak, société crée par George Eastman et le succès mondial rencontré par son célèbre appareil photo, le Brownie qui a été à la photographie ce que sera bien plus tard la 2CV à l’automobile...


En France, tout d'abord représentée par Paul Nadar (fils du célèbre photographe Félix Nadar), cette Compagnie, crée en 1897, 
Eastman Kodak S.A.F., sous contrôle britannique, avec un Siège et un magasin de ventes situé à Paris (avenue de l'Opéra),
devient Kodak S.A.F. en 1906.
Celle-ci s'installe, en 1913, au coin de l'avenue Montaigne et de la rue François 1er à Paris, et, en 1925, regroupe ses activités 
de traitement dans un nouvel établissement situé à Sevran.
Charles Pathé

Né en 1863, Charles Pathéest installé à Vincennes depuis 1891 et travaille alors comme gratte papier chez un avoué, après avoir fait mille métiers, en particuler en Argentine, d'où il revient atteint de la fièvre jaune, mais il s'en sort... Par hasard, en 1894, il découvre le phonographe d'Edison et en assure l'exploitation d'abord dans les fêtes foraines, puis dans une boutique et un atelier installés Cours de Vincennes, à Paris.

Le 28 décembre 1895, il est enthousiasmé par sa rencontre avec les frères Lumière et les premières "projections cinématographiques" publiques. Associé avec son frère Emile, il décide d'exploiter cette invention et, en 1896, fait réaliser les premiers films d'édition.
L'année suivante est créée la "Compagnie Générale des Phonographes, Cinématographes et Appareils de Précision". Des succursales sont fondées en Europe et même aux Etats-Unis (1904).


En 1908, grâce à l'apport de capitaux financiers, est formée la nouvelle Société Pathé-Cinéma afin de développer les activités dans ce domaine et
si possible, de produire des filmsvierges qu'il est de plus en plus difficile de trouver sur le marché américain. C'est vers cette date que,
pour compléter les capacités des ateliers de Joinville-le-Pont, commence la construction d'une usine de production sur un terrain 
situé à Vincennes, près du château, appartenant à Charles Pathé : elle ne cessera de se développer.
S'étant déjà rencontrés deux fois (en 1906 et 1908), George Eastman et Charles Pathé se contactent à nouveau en 1926. 
Le premier propose à son principal concurrent à Paris la création d'une Société industrielle et commerciale commune.
Après un an de négociation, ils arrivent à un accord : ainsi naît le 28 juillet 1927, par fusion de Kodak S.A.F. et de la Société Française Pathé-Cinéma,
la nouvelle Société Kodak-Pathé S.A.F. dont le capital est fixé à 100 millions de francs.
En octobre 1931, elle devient filiale d'Eastman Kodak Company.
les frères Pathé
          Caricature de Adrien Barrère

En 1918 , les frères Pathé se sont convaincus de la suprématie de l'industrie cinématographique américaine et qu'il est illusoire de vouloir s'y opposer. Il s'agit alors de céder dans les meilleures conditions les différentes branches de leur trust.

À cet effet, la branche phonographique et l'usine de Chatou sont détachées de l'ensemble et continueront à fonctionner sous la direction d'Émile Pathé, qui abandonne ainsi toute activité dans la branche cinéma. En 1924, Émile Pathé prendra sa retraite et cédera ses intérêts à Marconi : la société s'appellera désormais « Pathé Marconi » bien que Pathé n'ait plus de participation dans l'affaire.

La branche cinématographique deviendra « Société Pathé Cinéma » et sera animée par Charles Pathé exclusivement.

À remarquer que Charles Pathé a prévu par contrat de percevoir 10 % des sommes reçues pour chaque cession d'une affaire.

En1920, Charles Pathé va céder à une nouvelle société baptisée « Pathé Consortium Cinéma » (mais dans laquelle Pathé s'est gardé d'investir) les studios de Joinville et l'appareil de distribution.
En contrepartie la nouvelle société devra verser une redevance de 10% de son chiffre d'affaires, ce qu'elle n'arrivera pas à assurer, d'où des litiges incessants.
Charles Pathé va liquider à des conditions que nous connaissons mal les différentes succursales étrangères, notamment la branche américaine baptisée « Pathé Exchange ».
Il va céder à Eastman la prospère usine de films vierges de Vincennes pour la somme de 150 millions de francs. Cette cession sera présentée comme une collaboration entre Eastman et Pathé,
 puisque la nouvelle société s'appelle « Kodak Pathé », mais en réalité la quasi-totalité des actions (995 000 sur un million) et le pouvoir sont dévolus au trust américain.
En même temps qu'il liquide les actifs principaux, Charles Pathé va cependant créer deux activités annexes intéressantes. Il imagine en 1922 le Pathé Babyou « Cinéma chez soi »,
appareil de format réduit (sur film 9,5 mm) conçu par Continsouza pour les particuliers et qui connaîtra un succès tel que l'usine Continsouza aura du mal à fournir. 
Charles Pathé ne veut pas investir des fonds importants dans cette activité. Il va donc créer une « Société du Pathé Baby » au capital de dix millions de francs dans laquelle il participe 
à hauteur de un million de francs. La nouvelle société est tenue d'acheter exclusivement les bandes positives de format réduit à Pathé Cinéma, ce qui représente des rentrées financières appréciables et sans risques.
Dans le même ordre d'idées, Charles Pathé va s'efforcer dès 1923 de promouvoir e Pathé Rural appareils de projection et films de format réduit (sur film de 17,5 mm
destinés à la petite exploitation rurale et aux salles de patronage et concurrent du film 16 mmqui vient d'apparaître aux États-Unis. Mais comme il n'arrive pas à trouver d'investisseurs,
ce projet subit de grands retards. Finalement Charles Pathé se résigne à le lancer lui-même en 1928   (Texte source : Société Kodak)
les frères Pathé

Il est incontestable que l’apparence de collaboration entre Eastman et Pathé n’est en réalité qu’une prise de possession du merveilleux outils européen que constituait cette usine ultra moderne de Vincennes, et qui permettait à Kodak de produire hors Amérique les films aussi bien photographiques que cinématographiques.

Il est extrêmement tentant de faire un parallèle entre le développement des sociétés photographiques de ce début de XX° siècle, et celui des géants informatiques d’aujourd’hui, passant d’entreprises tout à fait artisanales à de véritables trusts en quelques années. L’aventure Kodak ressemble aussi bien à celle d’Apple que de Microsoft, voire Google avec encore une similitude : dans l’informatique comme dans la photographie et le cinéma, les progrès réalisés sur le plan technique ont souvent été le fait d’amateurs géniaux comme Roland Moreno, l’inventeur de la carte à puce, ou de bénévoles astucieux comme les créateurs des logiciels libres.

Charles Pathé, à son époque, bâtira un empire à partir d’une diversification de son métier de restaurateur...

   
La suite...
Retour à la page d'accueil du site